Dans le contexte actuel de lutte contre le réchauffement climatique et notamment d’amélioration des performances énergétiques des immeubles, la Loi « Climat et Résilience » du 22 août 2021 est venue faciliter l’isolation thermique par l’extérieur des bâtiments.
Jusqu’alors, ce type d’isolation pour les bâtiments construits en limite de propriété nécessitait que le propriétaire voisin donne expressément son accord sur l’empiètement en surplomb.
Pour répondre à cette situation de blocage, le nouvel article L.113-5-1 du Code de la construction et de l’habitation entré en vigueur depuis le décret du 23 juin 2022, confère un droit de surplomb du fonds voisin de 35 cm au plus.
Toutefois, le propriétaire d’un bâtiment existant qui procède à son isolation thermique par l’extérieur ne peut bénéficier de ce droit de surplomb du fonds voisin que si aucune autre solution technique ne permet d’atteindre un niveau d’efficacité énergétique équivalent ou que cette autre solution présente un coût ou une complexité excessifs. Par ailleurs, l’ouvrage d’isolation par l’extérieur ne peut être réalisé qu’à deux mètres au moins au-dessus du pied du mur, du pied de l’héberge ou du sol, sauf accord des propriétaires des deux fonds sur une hauteur inférieure.
- Les modalités de mise en œuvre de ce droit sont constatées par acte authentique ou par décision de justice.
En pratique, le propriétaire du bâtiment à isoler devra notifier au propriétaire voisin, son projet de bénéficier du droit de surplomb en précisant le montant de l’indemnité préalable qui lui sera versé à ce titre.
Ce droit de surplomb emporte le droit d’accéder temporairement à l’immeuble voisin et d’y mettre en place les installations provisoires strictement nécessaires à la réalisation des travaux, une convention devant en définir les modalités de mise en œuvre. En contrepartie, le propriétaire de l’immeuble voisin se voit accorder une indemnité.
- Le propriétaire voisin dispose d’un délai de 6 mois à compter de la notification pour manifester son refus.
Il peut s’opposer à l’exercice du droit de surplomb de son fonds pour un motif sérieux et légitime tenant à l’usage présent ou futur de sa propriété ou à la méconnaissance des conditions d’exercice de ce droit.
Il peut s’opposer au droit d’accès à son fonds et à la mise en place d’installations provisoires si la destination, la consistance ou la jouissance de ce fonds en seraient affectées de manière durable ou excessive.
Dans ce délai, il a également la possibilité de saisir le juge en fixation du montant de l’indemnité préalable.
En tout état de cause, lorsque le propriétaire voisin obtient une autorisation administrative de construire en limite séparative ou en usant de ses droits mitoyens et que sa mise en œuvre nécessite la dépose de l’ouvrage d’isolation, les frais de cette dépose seront à la charge du propriétaire du bâtiment isolé, l’indemnité versée demeurant acquise.
- Pour autant, des incertitudes demeurent dans l’exercice concret de ce droit.
Le Conseil constitutionnel, protecteur de l’article 17 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, a jugé conforme le droit de surplomb à la Constitution (décision n° 2021-825 DC), l’exercice de ce droit donnant lieu à indemnité du propriétaire subissant l’emprise.
Toutefois, les textes ne donnent aucune indication pour calculer cette indemnité. En cas d’échec de négociations entre les voisins, elle sera fixée par les juges qui devront nécessairement avoir recours à des expertises judiciaires, allongeant ainsi le délai pour réaliser les travaux d’isolation.
En conclusion, ce nouveau droit de surplomb constitue une avancée notable pour la réalisation d’un parc immobilier résilient. Il est seulement regrettable que ses conditions de mise en œuvre risquent de générer un contentieux accru face à des propriétaires voisins considérant que leurs intérêts devraient prévaloir sur la nécessité d’une action rapide et étendue pour lutter contre les passoires thermiques.